Paul Madaule et la dyslexie
“Le dyslexique est dyslexique chaque seconde de sa vie .” P. Madaule , L’Univers Dyslexié, 1978
Hier encore j’entendais un adolescent dire : “Quand on me donne plusieurs consignes en atelier, je dois les noter car je ne suis pas sûr d’avoir tout compris.”
Nous les appelons aujourd’hui les “dys” , c’est le diagnostic. Mais hier ils étaient tout aussi nombreux sans le savoir : des enfants, des jeunes qui comprennent de travers, qui ont du mal à raconter un évènement dans l’ordre chronologique sans balbutier, à lire et à écrire, à exprimer leur ressenti, leurs émotions. Qui n’est pas en contact tous les jours avec des enfants qui donnent l’impression de ne jamais aller au fond des choses, d’être superficiels, immatures, de dissimuler leur monde intérieur et de se laisser aller au gré de leurs échecs?
Les parents, les enseignants, les thérapeutes, tous les acteurs qui se démènent pour les comprendre et les accompagner sont démunis devant ces esprits confus et pourtant pleins de ressources.
Paul Madaule, que j’ai rencontré en formation, raconte dans son témoignage combien la dyslexie est une forme de maladresse qui envahit l’être tout entier, qui l’isole et le rend étranger au monde environnant, à la recherche constante de personnes aimantes et sans jugement. Il raconte qu’il a été lui-même dyslexique jusqu’à l’âge de 18 ans jusqu’à ce qu’il rencontre le Pr Tomatis. Les entraînements à l’écoute qu’il a suivis lui ont permis d’accéder enfin à l’univers du Langage, de la communication sans détour, d’accéder à sa vraie personne, et de se révéler dans toutes ses aspirations profondes, ses compétences, sa vocation. Ainsi, il est devenu psychologue et a ouvert un Centre de l’Ecoute, le Listening Center à Toronto en 1978.
Le fait est que nous traitons encore aujourd’hui, malgré tout ce que nous savons sur le cerveau et ses réseaux neurologiques, la dyslexie, la dyspraxie, la dyscalculie, la dysorthographie, et autres dysfonctionnements d’une façon trop ciblée, trop systématique.
Or ces dysfonctionnements viennent d’abord de ce que les messages sensoriels sont mal interprétés par le sujet. L’oreille est l’intégrateur principal de tous nos sens. Les messages sonores qui sont envoyés dans les différentes aires corticales du cerveau doivent être perçus de manière parfaite pour entraîner des commandes les plus ajustées possible. Toutes les connections neurologiques, à l’instar des systèmes sympathique et parasympathique sont directement en lien avec l’oreille. Les aires auditives, les aires du langage, de Broca et de Wernicke, les cortex visuels, sensoriels, moteurs, préfrontal, … tous sont stimulés par notre oreille. Cependant si cette information n’arrive pas rapidement et correctement, les réponses seront inadaptées. De fait, les distorsions d’écoute sont un réel handicap qui peut entraîner de grandes détresses relationnelles, sociales et scolaires pour commencer.
Par ailleurs il faut savoir que ces messages, avant d’aller dans les aires spécifiques du cortex, passent par la porte du thalamus, le cerveau limbique qui , s’il est chargé d’émotions négatives, dira tout simplement: “Non, je ne veux pas, j’ai peur. ” La musique a une fonction extraordinaire de “ramonage” de ces émotions négatives paralysantes, et d’ouverture de cette porte de la conscience, sur soi-même, sur le monde du langage, des actions et des relations sociales. Les séances d’écoute, adaptées à chaque individu, ciblent en tout premier lieu l’apaisement du sujet, sa mise en confiance afin de laisser cette porte d’entrée toujours ouverte. Ensuite seulement les séances d’écoute vont travailler sur les différentes zones du cerveau de façon à stimuler les fonctions cognitives et harmoniser l’éveil du corps et de l’esprit.
Sept. 2018